propriété

La Conférence des Secrétaires Fédéraux a adopté la Déclaration des Principes du Parti Socialiste

Article du Populaire de Saône-et-Loire n°7. 

Ce texte n’est pas signé, mais probablement de Jacques Muglioni alors rédacteur en chef.

Texte publié dans Le populaire de Saône-et-Loire, Organe hebdomadaire de la Fédération Socialiste S. F. I. O. de S-et-L du samedi 9 mars 1946.


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Le but du Parti socialiste S.F.I.O. est de libérer la personne humaine de toutes les servitudes qui l’oppriment et, par conséquent, d’assurer à l’homme, à la femme, à l’enfant, dans une société fondée sur l’égalité et la fraternité, le libre exercice de leurs droits et de leurs facultés naturelles.

Le caractère distinctif du Parti socialiste est de faire dépendre la libération humaine de l’abolition du régime de la propriété capitaliste qui a divisé la société en classes nécessairement antagonistes et créé pour l’une la faculté de jouir de la propriété sans travail, pour l’autre l’obligation de vendre son travail et d’abandonner une part de son produit aux détenteurs du capital.

Fermement attaché à la liberté de conscience et à la laïcité de l’État et de l’école, le Parti socialiste a pour action propre de grouper sans distinction de croyances philosophiques ou religieuses la masse des travailleurs de tous genres – travailleurs intellectuels ou manuels – sur le terrain politique, économique et doctrinal, en vue de la conquête des pouvoirs publics, condition non suffisante mais nécessaire de la transformation sociale.

Le Parti socialiste est un parti essentiellement révolutionnaire : il a pour but de réaliser la substitution au régime de la propriété capitaliste d’un régime où les richesses naturelles, comme les moyens de production et d’échange, deviendront la propriété de la collectivité et où, par conséquent, les classes seront abolies. Cette transformation accomplie dans l’intérêt de tous les hommes, ne peut être l’œuvre que des travailleurs eux-mêmes. Quels que soient les moyens par lesquels elle sera accomplie, elle constitue par elle-même la révolution sociale. C’est en ce sens que le Parti socialiste a toujours été et continue d’être un parti de lutte de classe, fondé sur l’organisation du monde du travail.

Il est un parti essentiellement démocratique, parce que tous les droits de la personne humaine et toutes les formes de la liberté sont indissolubles les unes des autres. Il n’y a pas de citoyen libre si le travail n’est pas affranchi. Il n’y a pas d’émancipation du travail si la cité n’est pas libre. Les libertés démocratiques étendues et développées sont à la fois l’élément nécessaire de tout régime socialiste et le moyen d’assurer au prolétariat, au sein même du régime capitaliste, les réformes progressives qui améliorent sa condition et accroissent sa capacité révolutionnaire.

Il est un parti tout à la fois national et international.

Essentiellement national parce qu’il n’y a pas de travail libre dans une nation asservie ou sujette, parce les travailleurs que les abus du capitalisme tendaient a rejeter hors de la patrie s’y sont réintégrés eux-mêmes par un siècle et demi d’efforts et de sacrifices, que la patrie est aujourd’hui leur bien, et en grande partie leur œuvre et qu’ils sont déterminés à la défendre.

Essentiellement international parce que les lois de l’économie ont pris un caractère universel, parce que les intérêts de tous les travailleurs sont solidaires aussi bien que les droits et les devoirs de tous les hommes, parce que le premier de ces intérêts, la paix, ne peut être assuré en dehors de leur organisation et de leur action internationales.


La déclaration des droits


Article du
Populaire de Saône-et-Loire n°8.

Texte publié dans Le populaire de Saône-&-Loire, Organe hebdomadaire de la Fédération Socialiste S.F.I.O. de S.-et-L. du Samedi 16 mars 1946.


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L’Assemblée Constituante abordant le problème constitutionnel a discuté le texte d’une nouvelle déclaration des droits. Quelques uns ont jugés cette révision inutile, d’autres l’ont affirmée inopportune ; seuls, les socialistes en furent les champions très remarqués. Pourquoi ?

Parce que nous ne pensons pas qu’il faille indéfiniment se réclamer du passé, si glorieux fût-il, que l’histoire évolue sans cesse vers de nouvelles formes et que le devoir des sociétés politiques est d’adapter leurs institutions aux exigences actuelles de la vie.

Nous n’avons jamais cru que la Déclaration de 1789 fût l’expression définitive des droits de l’homme. La révolution de 89 avait amené l’avènement politique de la bourgeoisie qui déjà avait acquis sa suprématie économique aux dépens des féodalités cléricales et nobiliaires. La déclaration des droits ne faisait que consacrer les aspirations politiques et civiles de la classe dominante de l’époque : elle ignore les droits de la femme et les droits du travailleur, elle ne connaît que « la seule liberté commerciale dénuée de conscience », les droits exclusifs des individus alors les plus aptes à réaliser l’épanouissement de la civilisation industrielle.

En un mot, elle était la charte politique de la démocratie bourgeoise, la somme juridique adaptée aux exigences de fait de l’économie libérale.

Mais au cours du XIXe siècle, les penseurs socialistes en France, et la critique historique de Karl Marx, découvrirent l’aspect nouveau de la lutte des classes. La bourgeoisie, jadis révolutionnaire, avait par sa vertu même, forgé des armes qui devaient se retourner contre elle. Sa prospérité se doublait d’un développement parallèle, en nombre et en cohésion, du prolétariat. Au travail individuel de l’artisan s’était substitué le travail collectif des ouvriers d’usine ; la propriété capitaliste devenait un non-sens économique et un scandale moral. De plus en plus les contradictions du régime déterminaient des crises et des guerres. En même temps, la classe opprimée luttait, plus énergiquement, pour sa libération.

C’est pourquoi – et nos camarades à l’assemblée l’ont très bien dit – la nouvelle Déclaration des Droits doit exprimer quels sont les rapports sociaux dans la vie actuelle et les aspirations du prolétariat que justifie à la fois l’histoire et la raison. Il s’agit de consacrer une conception nouvelle de la personne humaine, de la liberté et de la propriété. Il faudrait dire clairement que l’homme ne peut plus être contraint de vendre son travail et considéré lui-même comme une marchandise, qu’il n’existera plus de profit sans travail, dans le cadre d’une économie collective où la forme de propriété adoptera la forme de la production.

« Ce n’est pas le droit qui crée l’histoire, c’est l’histoire qui détermine le contenu de la notion juridique. » La Déclaration de 1946 doit tenir compte des réalités présentes pour libérer les forces morales de l’avenir.